Fahrenheit 452 : des livres à la culture...: Points de fuite de Solange Schneider.

Un recueil époustouflant dans lequel, comme l’indique le titre, des êtres vont tenter d’échapper à leur destin, à leur pays, à leurs traditions, coutumes et religions. Des textes d’une force sublime, tout en douceur et en délicatesse. Des tranches de vie dans lesquels la passion, l’amour de la vie, de sa famille, le sens de l’existence sont autant de protagonistes.

Nous avons particulièrement apprécié L’étrangère, texte fulgurant, touchant de vérité, de passion, d’obscurantisme, qui questionne la notion d’étranger. Qui est l’étranger : celui qui vient d’un pays lointain, celle qui refuse les traditions de sa culture, de sa religion, qui ne veut pas se plier à des traditions qu’elle considère comme barbares ? Deux points de vue pour plus de force de frappe ! Une chute chirurgicale : « Moi, je redoute d’affronter ceux qui furent les miens. » Un renversement ironique s’opère puisque c’est celle qui transgresse les usages, la proscrite, qui finira par désavouer sa famille.

La mémoire des femmes est, quant à lui, un texte d’une beauté suave et dure à la fois, sur l’absence, le silence, la maternité. Un clin d’œil à Alice au pays des Merveilles, même s’il s’agit d’une nouvelle sur la vie, son sens et l’opposition animé – inanimé, qui nous donne à voir comment l’héroïne comble le manque avec les objets : « Je peuple ton absence et ma raison, je peuple ma maison. »

On ne peut qu’être bouleversé par Le problème avec David…, nouvelle profonde sur l’étrangeté, la différence, sur ce qui est problématique, en jouant sur les divers points de vue. Une très belle histoire d’amour complet entre un père et son fils, le David de David et Goliath ? (Goliath étant sa mère.) À vous de voir !
Mais aussi en lisant La répudiée : l’histoire violente et terrible de Naima et de sa fille Houria, dans le monde des mariages arrangés et du devoir de donner un fils à son mari, de la honte d’accoucher d’une fille. Une autre façon d’aborder la condition des femmes dans certains pays, qui malgré leurs rêves d’Occident, d’exil, de changement, ont du mal à s’extraire des coutumes, traditions, religions qui les enferment, et parfois trouvent la liberté de façon détournée et tragique.

Ou en nous plongeant dans L’exil, histoire d’une jeune fille qui refuse le mariage arrangé prévu par sa mère : « Je regarde ma mère, et pour la première fois, je vois une étrangère. », une mère prête à « vendre » sa fille, alors qu’elle sait pertinemment qu’elle ne supporte pas Samir, le jeune homme qui a été choisi pour elle.
« Des éclats de voix me parviennent, j’entends ma mère, une phrase cinglante qui coupe l’air comme un sabre : « C’est la tradition, Maryam ! ». Une dernière nouvelle qui offre l’espoir d’un renouveau grâce à l’éducation et aux études supérieures, mais aussi un lien renoué avec la terre qui a vu naître les deux jeunes protagonistes !

La cruche nous conte une amitié qui va trop loin, un personnage qui pense pour un autre et qui pense mal… Il est facile de croire savoir ce qui est bon pour l’autre, en ne lui demandant pas ce qu’il ressent. Cela peut, comme dans cette nouvelle, prendre des proportions terribles…

En conclusion, un recueil à dévorer et partager !