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06 juin 2022

Chronique littéraire : Mémoires d'Hadrien de Marguerite Yourcenar (Gallimard).

Résumé de l'éditeur
Cette oeuvre, qui est à la fois roman, histoire, poésie, a été saluée par la critique française et mondiale comme un événement littéraire. En imaginant les Mémoires d'un grand empereur romain, l'auteur a voulu "refaire du dedans ce que les archéologues du XIXe siècle ont fait du dehors". Jugeant sans complaisance sa vie d'homme et son oeuvre politique, Hadrien n'ignore pas que Rome, malgré sa grandeur, finira un jour par périr, mais son réalisme romain et son humanisme hérité des Grecs lui font sentir l'importance de penser et de servir jusqu'au bout.
"... Je me sentais responsable de la beauté du monde", dit ce héros dont les problèmes sont ceux de l'homme de tous les temps : les dangers mortels qui du dedans et du dehors confrontent les civilisations, la quête d'un accord harmonieux entre le bonheur et la "discipline auguste", entre l'intelligence et la volonté.

Notre chronique 
Probablement notre roman préféré de Marguerite Yourcenar, même si tous ses écrits sont remarquables ! Cet ouvrage nous entraîne dans l’Histoire de l'Empire romain, d’Hadrien, dans ses pensées, ses aspirations, ses qualités, ses « vices », sa profondeur et son ardeur ! Un homme, un empereur, un être aux facettes multiples à découvrir ou redécouvrir.
« [...] mes premières patries ont été les livres. À un moindre degré, des écoles. »
Une tranche historique racontée dans une langue de toute beauté, avec poésie et réalisme. 
« Quand je considère ma vie, je suis épouvanté de la trouver informe. L’existence des héros, celle qu’on nous raconte, est simple ; elle va droit au but comme une flèche. Et la plupart des hommes aiment à résumer leur vie dans une formule, parfois dans une vanterie ou dans une plainte, presque toujours dans une récrimination ; leur mémoire leur fabrique complaisamment une existence explicable et claire. Ma vie a des contours moins fermes. Comme il arrive souvent, c’est ce que je n’ai pas été, peut-être, qui la définit avec le plus de justesse : bon soldat, mais point grand homme de guerre, amateur d’art, mais point cet artiste que Néron crut être jusqu’à sa mort, capable de crimes, mais point chargé de crimes. »
Nous y découvrons un intellectuel, un penseur, un amant - passionnément amoureux d'un archétype de beauté célébré dans tout le monde antique, dont la mort le laissera profondément meurtri -, un chef de guerre...
Au soir de sa vie, les confessions d'un être lucide et désenchanté, que l'expérience a rendu profondément tolérant.
« [...] je ne suis pas encore assez faible pour céder aux imaginations de la peur, presque aussi absurdes que celles de l’espérance, et assurément beaucoup plus pénibles. S’il fallait m’abuser, j’aimerais mieux que ce fût dans le sens de la confiance ; je n’y perdrai pas plus, et j’en souffrirai moins. »
Un grand Marguerite Yourcenar, extrêmement bien documenté et d'une prodigieuse érudition, évoquant, comme toutes les oeuvres qui comptent, des questionnements intemporels. Et justement, très actuels.
"Mémoires" à comprendre comme réminiscences, souvenirs et comme témoignage à laisser à la postérité.
À mettre entre toutes les mains.

Pour aller plus loin


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