20 août 2025

Chronique littéraire : Du côté des vivants de Violaine Bérot (Buchet Chastel).

Résumé de l’éditeur
Dans la chambre 308 d'un petit hôpital de province, il y a deux patients :
Greg, qui a failli mourir. Les médecins du grand centre sont paraît-il les meilleurs. Sauf qu'il s'est vu mourir. Alors remettre ça, il n'en est pas question. Greg ne reprendra pas la chimio. Les heures qui vont suivre lui montreront que tout n'est pas si simple.
Et Alphonse, un vieil homme au cœur usé, qui se dit qu'il est bien temps pour lui de mourir.
Autour d'eux, pendant cette journée décisive, il y a tous les autres, parce qu'il passe toujours beaucoup de monde dans une chambre d'hôpital : une dame du ménage qui pense à son homme tant aimé. Une toubib argentine, convaincue que son rôle est de sauver les gens. Paul, le grand ami de Greg, qui n'en peut plus de croire Greg près de mourir puis de le découvrir ressuscité. Une jeune fille étrange qui devine des présences que personne ne voit. Et d'autres encore...
Et puis il y a les morts, les défunts de chacun. Ils tournent autour de la chambre 308, discrets, quasi imperceptibles. N'empêche qu'ils s'entêtent à rester du côté des vivants.

Notre chronique
Dans la chambre 308 d’un petit hôpital de province, deux hommes partagent bien plus qu’un espace : un seuil. Greg revient d’entre les morts. Il a vu la fin de près et refuse de recommencer la chimio. Alphonse, plus âgé, au cœur fatigué, se dit qu’il est temps d’en finir. Et autour d’eux, la vie s’infiltre encore, obstinée, par la porte entrouverte, le pas des soignants, le regard d’un ami, la parole d’un inconnu, les mimiques d’une jeune fille.
Du côté des vivants m'a bouleversée. L’autrice y interroge, sans jamais imposer : comment accompagner ceux qui partent ? Comment écouter leurs volontés, même lorsqu’elles déchirent les nôtres ? Faut-il tout faire pour retenir les vivants, ou savoir les laisser aller ?
Greg, « une plume, un coup de vent le ferait décoller », se demande s’il peut encore croire en l’avenir. Dans le grand hôpital des cancéreux, « les fenêtres étaient condamnées… pour donner l’illusion. » Ici, il espère qu’on peut « ouvrir en grand les fenêtres ». Une métaphore splendide pour dire son besoin de respiration, de choix, de liberté.
De l’autre côté de la pièce, Alphonse vit avec une douleur ancienne :
« Christelle, c’est son autre fille. La deuxième. La vivante. Elle sait qu’il ne pense qu’à l’autre, qu’il ne pense qu’à sa grande. »
 Cet extrait dit le poids du deuil. Et aussi le mal que l’amour peut faire, quand il devient aveugle.
Mais dans ce lieu de fin de vie, chacun cherche encore un sens :
« À qui pourrait-il expliquer qu’ici il s’est enfin trouvé une utilité, qu’ici son rôle est de faire pouffer de rire une jeune fille malade. Que ça suffit pour donner du sens à une vie qui n’en a plus. »
Les récits s’entrelacent, la femme de ménage, si souvent invisible, qui trouve là « ce qui la garde en vie, exister encore dans le regard de certains, malgré tout » ; la médecin argentine, engagée ; Paul, l’ami loyal et épuisé ; une adolescente étrange, traversée d’intuitions. Et les morts, discrets, qui s’attardent encore 
« du côté des vivants ».
Le style de Violaine Bérot est poétique et prosaïque. Une langue simple, mais lumineuse.
Le roman pose avec pudeur les vraies questions :
« Est-ce qu’une fille doit imposer ses choix à son père ? Est-ce qu’elle doit décider pour lui et ne pas tenir compte de ses désirs ? »
 Et Greg, finalement, choisit « des instants où l’on est heureux d’être ensemble, où l’on ne se pose pas davantage de questions », et décide de « passer du temps avec les inconnus qui surgiront, comme Alphonse ».
Le roman tout entier repose sur cette attention aux détails infimes, ces dialogues de rien qui sont pourtant tout, ces gestes quotidiens qui sauvent.
 Et dans ce petit théâtre hospitalier, la vie reprend ses droits, modestement.
 Car il y a encore des fenêtres. Et peut-être, du vent.

Pour aller plus loin
Notre chronique de Comme des bêtes

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Bonjour !
Votre commentaire sera bientôt en ligne.
Merci d'échanger avec nous !
Gabriel et Marie-Hélène.