01 septembre 2025

Chronique littéraire : Le soldat désaccordé de Gilles Marchand, lu par Laurent Natrella (Aux Forges de Vulcain, Audiolib).


Résumé de l’éditeur
Paris, années 20, un ancien combattant est chargé de retrouver un soldat disparu en 1917. Arpentant les champs de bataille, interrogeant témoins et soldats, il va découvrir, au milieu de mille histoires plus incroyables les unes que les autres, la folle histoire d'amour que le jeune homme a vécue au milieu de l'enfer.
Alors que l'enquête progresse, la France se rapproche d'une nouvelle guerre et notre héros se jette à corps perdu dans cette mission désespérée, devenue sa seule source d'espoir dans un monde qui s'effondre.

Notre chronique
Je lis pour la première fois un ouvrage de Gilles Marchand, et ce ne sera pas le dernier, loin de là ! Le soldat désaccordé est un roman d’une rare intensité. L’Histoire se teinte de fable et  les blessures des hommes sont tels des silences trop lourds pour être dits. Le Soldat désaccordé, entre réalisme poétique et quête mémorielle, est à la croisée de la littérature historique et du roman d’amour, le véritable. La petite et la grande histoire s’entremêlent. Émile et Lucie sont, tels Roméo et Juliette, les grands perdants de cette guerre inhumaine à tant de points de vue…
« On a tous une histoire d’amour intense, forte, dévorante. Une qui a tout emporté sur son passage et qui ne s’est pas finie, ou qui n’a jamais eu lieu parce qu’elle n’était pas réciproque. Une qu’on n’a pas osé déclarer, une qu’on a gardée pour soi parce qu’on avait peur. Et même quand tout se passe bien, on a encore peur : que l’intensité s’en aille, que la passion se soumette comme un animal sauvage à qui on aurait appris à lever la patte. La passion ne donne pas la patte, elle te la met dans la gueule. Et quand tout va bien, on cherche des noises, on va au conflit sans savoir pourquoi, alors que la réponse est simple : faut que ça bouge, faut que ça brûle, faut que ça pète. Pas tout le temps, mais parfois, juste pour permettre au sang de faire un tour et de revenir. Juste pour voir si on a encore des larmes, si les cris peuvent encore sortir ou s’ils restent bloqués au fond de notre gorge. »
J’ai été immédiatement happée par la voix d’un narrateur qui tente, par la grâce des mots et des souvenirs, de retrouver des soldats qui ne sont pas revenus de la guerre.
« Depuis ma démobilisation, j’avais eu l’occasion de rencontrer beaucoup de spécialistes. Ils m’avaient confié à quel point ils avaient été désemparés par l’arrivée de ces patients qui souffraient d’hallucinations terribles, de tremblements irrépressibles (...), des dépressifs qui avaient perdu l’ouïe, la parole, la vue ou la mémoire sans aucune explication physiologique. C’est pour cela que l » on parlait d’obusite. On pensait que c’était le souffle des explosions qui provoquait des dégâts invisibles, une névrose de guerre, en somme. »
L’écriture de Gilles Marchand, précise et parfois onirique, fait entendre l’indicible. La lecture de Laurent Natrella, pour Audiolib, est magistrale. Elle sublime ce superbe ouvrage. 
Le roman aborde la question de la transmission. Car, le narrateur, sans nom, enquêteur amateur et poète hanté par la guerre lui aussi, part à la recherche de fragments : des lettres, des indices, des témoignages… 
« On avait les pieds lourds, alors on s’interdisait d’avoir le cœur lourd. On ne pouvait pas ajouter les larmes à la pluie, on aurait coulé. »
Un ouvrage à découvrir sans hésiter !

Pour aller plus loin
L'île du là-haut d'Adrien Borne. Lu par Xavier Baur.
Madelaine avant l'aube de Sandrine Collette. Lu par Clément Bresson.
La Carte postale d'Anne Berest, Lu par Ariane Brousse.

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