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17 décembre 2025

Chronique jeunesse : Perdues de Paul Bruard (Éditions Ex Æquo).

Résumé de l’éditeur
Ce n’était qu’un séjour immersif pour adolescents, dans une forêt immense et mystérieuse. Une seule règle : ne jamais s’aventurer seul, loin du campement. Alors pour Alice, Myna, Léna et Anna, s’éloigner en groupe n’était pas si grave. Mais la nature se révèle parfois très dangereuse, et s’y perdre peut devenir fatal. Comment survivre, sans eau ni nourriture dans un milieu si hostile ?

Et si elles n’étaient pas seules ?
Se perdre est parfois le meilleur moyen de se retrouver face à soi-même.
Mais à quel prix…
9/12 ans

L'auteur

Originaire de Franche-Comté et père de trois enfants, j’ai réussi à suivre, malgré mon côté rêveur, plusieurs cursus de formation. Après une licence en économie, j’ai obtenu le diplôme d’État d’éducateur spécialisé qui m’a permis de travailler dans différentes structures et auprès d’un large public. Je suis revenu depuis peu dans l’animation, et accompagne au quotidien des enfants de maternelle jusqu’au CM2. Amoureux des mots depuis le plus jeune âge, je suis sans cesse à la recherche de nouveaux projets. Après un passage dans le monde de la scène (auteur-compositeur-interprète de plusieurs chansons répertoriées sur différents sites de musique), j’ai décidé de me lancer dans l’écriture de romans et d’histoires plus courtes, dans le but de les partager avec les enfants que j’accompagne au quotidien.
« Faire voyager et transmettre le pouvoir merveilleux des mots » telle est ma 
devise !

Notre chronique
Perdues est un roman d’aventures et un roman initiatique, qui s’ouvre sur un séjour immersif en forêt. Très vite, l’expérience ludique se transforme en épreuve brutale. Alice, Myna, Léna et Anna, quatre adolescentes bravent les interdits, et sont suivies par Eliott, qui se précipite pour les aider dans un milieu implacable. 
« Portées par l’adrénaline, les quatre copines cavalèrent à travers les arbres, jusqu’à ce qu’Alice trébuche sur une racine, avant de s’écrouler (...). »
Chaque pas, chaque choix, peut devenir décisif. Je me suis laissée happer par cette tension constante : l’auteur réussit à maintenir un climat d’alerte constant.
« — Comment réagirez-vous, si un ours vous surprend et vous attaque ? Que se passera-t-il, si par hasard vous mangez une baie toxique ? Saurez-vous quoi faire, si l’un de vos potes tombe dans le fleuve qui traverse la forêt, et dont le courant est extrêmement violent ? Savez-vous au moins ce qu’il faut éviter, en cas de morsure de serpent ? 
Les regards se crispèrent sur les visages. 
Et paf… 
Satisfait, Guillaume reprit de plus belle. 
— Et les araignées ? Pensez-vous donc qu’elles sont toutes inoffensives ? Les piqûres de certaines peuvent se révéler dramatiques, les jeunes, mais encore faut-il savoir les reconnaître ! Et bien sûr, tout cela n’est rien, en comparaison du plus grand danger qui réside dans cette forêt. Celui qui dépasse tous les autres. Alors je vous écoute, puisque vous aimez rire… Une idée ?
(...) le plus dangereux serait de vous perdre. Car les bêtes qui vivent là, bien que dangereuses pour certaines, vous feront beaucoup moins de mal que la faim, la soif, la chaleur et le froid des nuits à passer sans abri. »
Dès les premières pages, la nature est un personnage à part entière, parfois hostile, souvent indifférente, toujours souveraine. Elle rappelle ces paysages littéraires où l’espace pousse les êtres à révéler ce qu’ils croyaient ignorer d’eux-mêmes.
Le récit avance par rebondissements : attaque d’ours, falaise sans retour possible, course éperdue dans la végétation… et pourtant ce n’est jamais gratuit. Les scènes d’action permettent également de décrire des liens d’amitié qui se renforcent à mesure que les obstacles se multiplient. J’ai trouvé les quatre héroïnes particulièrement attachantes, notamment parce que leurs failles sont assumées : peur, doute, découragement… J’ai apprécié la capacité à se dépasser sans même s’en rendre compte.
« Chaque pas en avant était un véritable supplice tant la douleur avait envahi son corps. Elle enveloppait chacun de ses muscles, et la foudroyait régulièrement de flèches cinglantes. »
L’histoire prend parfois des accents presque merveilleux. 
« Le monde animal est magique, si on cherche à le comprendre… »
L’apparition de l’aigle protecteur en est l’exemple le plus marquant. Ces touches poétiques élargissent le champ de l’aventure : elles suggèrent que comprendre la nature, c’est accepter qu’elle soit plus forte que nous (et c’est un sentiment que je comprends particulièrement, ayant fait de la voile pendant une douzaine d’années).
« Le cri de l’ours les fit tressaillir. Le bruit des arbres qu’il percutait sur son passage se rapprochait de plus en plus. Mais le pire n’était pas là. En balayant de sa lampe frontale les alentours, Léna ne put que constater l’évidence… Les quatre copines se trouvaient en réalité au sommet d’une falaise. Et si la bête les retrouvait, la seule issue possible consistait à sauter dans le vide et espérer une chute amortie par l’eau. »
Plusieurs réflexions sur la patience, la résilience et le lâcher-prise jalonnent le roman, notamment à travers l’écho délicat fait au Petit Prince. Ce clin d’œil littéraire invite à lire l’histoire comme une métaphore du passage, du mouvement intérieur, de la nécessité d’accepter les chemins détournés pour mieux avancer.
« Il est parfois bien plus important et tellement mieux de se laisser porter par la vie que de vouloir la contrôler…
Avancer et se dire que tout ira bien… 
Il repensa à une citation tirée de son livre préféré : Le Petit Prince. Dans cet ouvrage magnifique, Antoine de Saint-Exupéry avait écrit : Droit devant soi, on ne peut pas aller bien loin. »
Un récit bien construit, efficace, haletant, et surtout profondément humain. Perdues offre aux jeunes lecteurs une aventure dans laquelle la peur n’écrase jamais l’espoir, l’amitié demeure un fil solide, chacune découvre des ressources insoupçonnées. 
Un voyage en forêt, oui, mais surtout un voyage intérieur !

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Gabriel et Marie-Hélène.