Bonjour Elsa !
Pourriez-vous vous
présenter en quelques mots, svp ? Qu’est-ce qui vous fait vibrer ? En bref, qui
êtes-vous ?
Je suis une écrivain qui essaie de vivre sa vie, dans tous
les sens du terme. De la vivre vraiment. En écrivant, en travaillant pour la
gagner, en allant au cinéma, en aimant mes enfants, mon amoureux, mes amis, ma
famille. J’essaie d’être la personne que je voulais être.
Quand avez-vous
commencé à écrire ? Quel a été votre déclic ?
J’ai commencé à écrire il y a quinze ans, seulement. Je dis
« seulement » car je n’ai pas toujours écrit. En revanche, j’ai toujours lu,
beaucoup. Adolescente je rêvais plus de cinéma et de théâtre. Et puis, j’ai
connu un très gros chagrin d’amour, le premier, à 25 ans. Et du jour au
lendemain, je me suis mise à écrire un roman, comme si écrire était la seule
façon d’exister à nouveau, de me relever. Depuis ce jour, j’écris. L’écriture a
pris tellement de place dans ma vie, dans mon être que je me demande désormais
comment j’ai pu vivre sans écrire.
Exercez-vous une
autre profession ? Si oui : Laquelle ? Comment gérez-vous les deux ?
Oui je suis médiatrice scientifique auprès d’enfants dans
une bibliothèque de musée, à Paris, à temps partiel. Le reste du temps,
j’écris. En ce moment, j’écris l’adaptation pour le cinéma de mon avant-dernier
roman Les mijaurées, qui va être porté à l’écran par Anna Novion. Ces
deux versants de ma vie professionnelle sont tout à fait étanches pour moi. Je
sépare sans aucun problème.
Je me suis longtemps plaint de devoir gagner ma vie en
faisant autre chose qu’écrire, comme si l’énergie que je mettais dans cet autre
travail gâchait celle dont j’ai besoin pour écrire. Ce n’est plus ce que je
pense aujourd'hui. Devoir gagner ma vie autrement qu’en écrivant, dans des
proportions raisonnables évidemment, m’ancre dans un aspect social, concret de
la vie, que l’écriture sous n’importe quelle forme, offre moins. C’est aussi une
façon de ne plus penser au texte que je suis en train d’écrire, de le laisser
reposer, de force presque, c’est une façon de le mettre à distance plusieurs
heures par semaine. Je reviens parfois à lui avec plus d’énergie, plus d’envie
encore que quand je l’ai laissé. Quand au contraire je n’en peux plus ou quand
je suis perdue, je suis contente d’avoir une bonne excuse pour le lâcher !
Une lecture
fondatrice ?
Il y en a plusieurs. Jeune adolescente, j’ai été marquée par
les romans de Maupassant comme Une vie
ou Bel ami, ainsi que ses nouvelles
comme La parure qui m’a marquée. Puis
j’ai découvert les romans d’apprentissage avec Flaubert, Stendhal, puis Stefan
Zweig, Marguerite Duras et enfin Annie Ernaux avec Passion Simple, au tout début de ma vie d’adulte, de jeune femme.
Ça m’a éblouie. Et enfin l’écriture de Koltès au théâtre, de Copi ensuite, qui
m’ont ouvert les voies d’une oralité que je ne pensais pas possible, dont je ne
soupçonnais pas l’existence.
Quelles sont vos
principales sources d’inspiration ?
Les émotions, celles que l’on vit, ou que vivent ceux qu’on
aime. Celles aussi que l’on voit dans les films, je suis très influencée par le
cinéma que j’ai étudié à l’université, celles que l’on ressent dans les livres,
que l’on éprouve en écoutant de la musique, devant une toile qui nous touche.
Je suis très sensible aux personnes, à ce qu’elles dégagent, à ce qu’elles
racontent, ça me passionne, vraiment. D’ailleurs, je retiens tout ce qu’on me
dit ou presque, j’ai une mémoire d’éléphant et je crois que c’est à cause de ça
: tout ce que je vois, ce que je sens, me marque. Je le garde au cas où. Tout
peut servir. Tout peut être matière à écrire, un jour.
Avez-vous des
habitudes d’écrivain ?
J’en ai moins qu’avant, je me suis un peu détachée de mes
habitudes d’écrivain. Je me sens plus libre aujourd’hui dans l’exercice de
l’écriture. Il n’empêche qu’il me faut du silence et de la solitude. Et je ne
peux pas écrire deux textes en même temps. Pour le reste, je m’adapte.
Quels sont vos
meilleurs souvenirs d’auteur ?
Le jour où j’ai appris que j’allais être publiée, chez
Julliard. C’était totalement magique, l’endroit, le moment, la nouvelle que
j’espérais, mais que je n’attendais pas si tôt. C’est un moment fondateur parce
qu’il marque le début de ma vie d’auteur, et de ma vie tout court. J’ai
l’impression que ma vie a vraiment commencé à ce moment-là.
Des parties de ce
roman sont-elles autobiographiques ?
Oui, la trame de ce roman, la naissance d’un enfant
prématuré vient de ma propre expérience. Mon fils est né prématuré. Pour
autant, ce roman n’est pas autobiographique. Le fait que j’ai traversé cette
épreuve avec mon fils m’a donné, je pense, une forme de légitimité pour écrire
dessus, écrire avec. Je n’aurais pas osé sinon. Mais je l’ai traité comme un
formidable catalyseur de ce qu’est mettre un enfant au monde, devenir mère,
devenir père, être parents et plus seulement un couple. La prématurité d’un
enfant densifie, accentue ce qui se pose, à mon sens, à toute naissance.
C’était pour moi l’occasion d’écrire sur ces questions essentielles en
sublimant ce que j’avais vécu, en m’en détachant aussi par le prisme de la
fiction, en le tordant, en le réinventant pour mieux le comprendre, pour mieux
le transmettre, aussi.
Auriez-vous des
anecdotes à partager avec mes lecteurs sur l’écriture de ce roman ou / et sur vos
rapports avec vos lecteurs ?
Les rapports avec les lecteurs ont beaucoup changé depuis
les réseaux sociaux. On les décrie souvent et à raison, il y règne une violence
parfois difficile à supporter, mais ils ont aussi ouvert la voie à une
communication beaucoup plus directe avec les lecteurs, un échange possible qui
a brisé un mur entre l’auteur et son lecteur, qui a levé le voile sur une
opacité, sur un brouillard. Grâce aux réseaux sociaux, les lecteurs et
lectrices se sont incarnés, les auteurs aussi. Des noms, des prénoms, des
visages, des endroits, des professions. Je trouve ça fabuleux, réjouissant.
C’est une récompense immense de se savoir lu, et par qui, et comment.
Etes-vous en train
d’écrire un nouveau roman ?
Pas encore, j’ai besoin d’un peu de temps entre deux romans.
Et puis je suis en ce moment sur l’écriture du scénario des Mijaurées. Mais j’ai des idées qui
flottent dans ma tête. Un jour, je vais me jeter sur l’une d’entre elles et
voir ce qu’elle a dans le ventre : Peut-elle faire un roman ? Crée-t-elle
suffisamment d’émotions, de désir ? Amène-t-elle des mots ?
Le (traditionnel) mot
de la fin ?
« Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque.
À te regarder, ils s’habitueront. »
René Char
Et enfin et surtout, MERCI.
Pour en savoir plus, notre chronique.
Interview intéressante. J'aime beaucoup ce passage : "ils ont aussi ouvert la voie à une communication beaucoup plus directe avec les lecteurs, un échange possible qui a brisé un mur entre l’auteur et son lecteur, qui a levé le voile sur une opacité, sur un brouillard."
RépondreSupprimerC'est vraiment le ressenti que j'ai également !
Merci Edwige !!!!:)
SupprimerC'est une très belle interview !
RépondreSupprimerMerci 😍
SupprimerWahou, une interview pleine d'émotions je trouve, cette jeune femme m'a beaucoup touché et je vais me pencher sur son roman sans attendre !
RépondreSupprimerTu verras, il est superbe !!! Merci !
SupprimerVoilà une auteure que je ne connaissais pas mais dont le tableau dépeint me plait particulièrement. Le nom est noté, les titres de romans aussi, merci Marie Hélène =)
RépondreSupprimerJe t'en prie !!! Excellentes lectures ! Tu ne seras pas déçue !
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