08 février 2021

La fureur de lire : Lumière sur Brigitte Benkemoun (Je suis Le Carnet de Dora Maar, Stock).

 

Copyright photo Romain Lebastard.

Lumière sur Brigitte Benkemoun dont Je suis Le Carnet de Dora Maar a rejoint La fureur de lire !


Brigitte Benkemoun est née à Oran en Algérie. Elle a grandi à Arles, étudié à Aix en Provence et Lille, et vit à Paris.

Après trente de journalisme (Europe 1, France Inter, Canal+, France 2…), elle se consacre aujourd’hui à l’écriture. De ses livres, on dit souvent qu’ils sont des « romanquêtes » ou des « enquêtes intimes ». Ce qui est en somme une façon de continuer à exercer son métier de journaliste sous une forme littéraire. Elle enquête dans le passé comme elle investiguait autrefois au fil de l’actualité. Ses racines algériennes ont inspiré ses deux premiers livres, un carnet d’adresse acheté par hasard sur ebay lui a offert le point de départ d’une biographie éclatée de l’artiste et compagne de Picasso, Dora Maar.

Son 1er livre, La petite fille sur la photo, a été publié chez Fayard en 2012

Le second, Albert le Magnifique, en 2016 aux éditions Stock

Je suis le carnet de Dora Maar, paru en 2019 chez Stock, a obtenu le prix Geneviève Moll de la biographie. Il est déjà traduit par les Getty Publications aux USA, et le sera bientôt en allemand, italien, espagnol et chinois notamment.

Brigitte Benkemoun est l’épouse du réalisateur de documentaire Thierry Demaiziere.


Y a-t-il une plus belle anthologie que celle de livres qui ont été aimés. Très heureuse d’avoir sélectionnée par Marie Hélène Fasquel et Gabriel Erhart. 

Interview

Quand avez-vous commencé à écrire ?

Si l’on considère (à juste titre) le journalisme comme un acte d’écriture, j’ai fait mes premiers pas à vingt ans à La Provence, qui s’appelait alors Le Provençal. Mais si votre question porte sur l’écriture au sens noble, celle d’un vrai livre, c’était en 2010, quand j’ai commencé La petite fille sur la photo. Jamais auparavant je n’avais imaginé écrire un livre. Un Livre pour moi c’était Victor Hugo, l’Everest, un monument… Mais j’avais un documentaire télé en projet, autour de la guerre d’Algérie. Et une amie éditrice chez Fayard, Isabelle Seguin, m’a proposé d'éditer le livre qui accompagnerait le film. Le documentaire ne s’est pas fait, et elle a maintenu sa proposition, alors il a bien fallu que je me lance. 

Quels sont vos romans préférés ?

Dora Bruder de Modiano sans hésiter. Quand j’écrivais mon second livre Albert le magnifique, un ami auquel je racontais l’histoire de cet oncle m’a dit « mais ton Albert, c’est Dora Bruder séfarade ! ». J’avais lu d’autres livres de Modiano, il y a très longtemps et sans doute trop tôt, mais celui-ci jamais. Je l’ai dévoré dans la nuit. Et j’avais même l’impression que Modiano l'avait écrit pour moi ! Pour m’encourager, m’indiquer la voie. Cette voie (ou voix) c’est chercher, s’interroger, raconter ses recherches jusque dans les fausses pistes, remplir les blancs, interroger le dicible et l’indicible, mêler l’intime et l’enquête, laisser la trouvaille se révéler peu à peu sous les yeux du lecteur. Au fond, j’avais l’intuition de tout cela. Je sentais qu’il fallait que je me libère du journalisme. Mais avec Dora Bruder c’est devenu une évidence. Et chaque fois que je doute, que j’hésite, que je bloque en cours d’écriture, je reprends ce livre, et il me fait du bien. Un jour j’aimerais pouvoir dire merci à Patrick Modiano. 

S’il faut vous citer plusieurs livres, je rajouterais Rue des boutiques Obscures. Et un autre livre que j’ai beaucoup offert : Les gens dans l’enveloppe d’Isabelle Monnin. Et plus récemment Le tailleur de Relizane d’Olivia Elkaim.

Quelles sont vos habitudes d’écriture ?

Je suis lente et besogneuse. Autant j’avais l’habitude d’écrire d’un seul jet quand j’étais journaliste, autant maintenant je peux passer des heures à triturer un paragraphe. Le pire c’est le tout début du livre. Comme le fichier Word de mon ordinateur s’ouvre inévitablement tous les jours à la première page, je ne peux pas m’empêcher de relire le début ! Et donc, au lieu de reprendre l’écriture où j’en étais la veille, ce qui serait un gain de temps considérable, je commence par passer mes nerfs sur ce pauvre premier paragraphe. Si c’était un manuscrit, on verrait des tonnes de ratures dans tous les sens. Heureusement l’informatique ne trahit pas cet acharnement. 

Mais c’est peut-être, au fond, une forme d’échauffement. 

Quel retour de lecteur/lectrice vous a le plus émue ?

Quand la petite fille sur la photo s’est reconnue en couverture de mon premier livre. Cette photo représentant une petite fille dans les bras de son père descendant d’un paquebot en juillet 62 à Marseille était le point de départ du livre. C’est parce que j’ai cru me reconnaître sur cette photo que j’ai eu envie de commencer cette enquête sur les enfants de la guerre d’Algérie. Comprendre ce qui « nous » était arrivé. Cette petite fille, je l’avais cherchée pendant des mois. Je rêvais de pouvoir finir le livre avec elle. Au final c’est elle qui m’a trouvée en vitrine de la maison de la presse de Châteaurenard, à quelques kilomètres de chez moi. Et le plus incroyable c’est qu’elle s’appelle aussi Brigitte. Mais nous n’avons pas pu nous rencontrer, c’est une femme encore traumatisée par la guerre et l’exil qui n’a eu que la force d’en parler au téléphone

Autre retour émouvant, après Je suis le carnet de Dora Maar, celui du galeriste Marcel Fleiss qui m'a authentifié ce répertoire et ouvert son propre carnet d’adresses pour m’aider. Son avis était le plus important. Quand j’ai compris qu’il aimait le livre et ne regrettait pas la confiance qu’il m’avait accordée, ça valait tous les prix ! 

Le mot de la fin

Peut-on quitter Picasso ?

Pour aller plus loin



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