18 juin 2021

Chronique littéraire : Les Devoirs de Marcus Cicéron (Les Belles Lettres).


Les droits et les devoirs, des mots récurrents dans la parole des hommes politiques.

Les Droits sont inscrits dans la loi. Mais les devoirs ? Ne relèvent-ils pas du libre arbitre individuel ? 

On dit souvent : manquer à ses devoirs. Le déséquilibre entre droits et devoirs ne date pas d’aujourd’hui…

Les Devoirs évoqués par Cicéron sont-ils toujours d’actualité ?

Si l’on met de côté quelques particularismes tels que l’affranchissement des esclaves ou la réinsertion sociale des gladiateurs (!), on sera surpris par leur modernité. C’est que les devoirs ont une dimension morale.

Cette dimension morale dans l’œuvre du célèbre tribun explique dans une certaine mesure le fait que d’aussi nombreux textes soient parvenus jusqu’à nous.

En effet, en dehors de la bibliothèque consumée d’Herculanum, aucun rouleau d’origine n’a traversé le temps. Les récits de l’antiquité ont donc été copiés au fil du temps, en particulier au Moyen Âge  dans les fameux scriptoriums.

Or, pourquoi des moines, qui n’avaient pas comme de nos jours le souci de préserver un patrimoine culturel, auraient-ils soigneusement consigné des écrits païens ?

De toute évidence, il y a une corrélation étroite entre la pensée de Cicéron et celle des philosophes chrétiens. Saint-Augustin dans ses Confessions n’a-t-il pas repris mot pour mot certaines idées de Cicéron ?

Cette constatation appelle une remarque importante : la morale évangélique n’est pas issue d’une génération spontanée, elle était préexistante dans la morale des Grecs, et en particulier dans celle des stoïciens.

Jeune garçon, Cicéron avait du reste étudié en Grèce, et toute sa vie durant il est resté influencé par la philosophie grecque, quoique l’ayant un peu adaptée à son tempérament novateur.

Son intelligence hors du commun lui a permis de mettre en avant l’idée même de progrès, ce qui était particulièrement fort à l’époque. 

Pour Cicéron, Les Devoirs font l’homme, et l’Homme fait la Société. Rien ne peut fonctionner sans cela dans une société républicaine qu’il défend avec ardeur (ce qui lui coûtera la vie).

Ces devoirs sont : La justice, l’équité, la générosité, la clémence, la mesure, le respect des convenances, la bonne éducation, la courtoisie, l’urbanité, l’empathie, et l’amour, terme qu’il emploie à de nombreuses reprises. 

On voit bien à quel point ces notions résonnent aujourd’hui d’une étonnante modernité, et à quel point leur mise à mal reste un facteur de déséquilibre dans une Société, quelle qu’elle soit.

Loin d’être austère, l’œuvre de Cicéron est particulièrement humaine. Ses chagrins familiaux (en particulier la perte de sa fille chérie Tullia) ont beaucoup modifié son inspiration. Dans cette œuvre, il se fait notamment le défenseur des petites gens :

Ce sont parmi les humbles qu’on trouve les plus loyaux… Et c’est Thémistocle qu’il faut prendre pour Maître quand il dit : j’aime mieux un homme sans fortune, qu’une fortune sans homme.

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Gabriel et Marie-Hélène.