Chronique littéraire : Nouvelles Orientales de Marguerite Yourcenar.

Attention, chef - d'œuvre !
On ne présente plus cette grande auteure, mais pour ceux et celles qui n'auraient pas encore rencontré son œuvre, ce recueil de dix nouvelles - certaines inspirées d'histoires ou légendes préexistantes - est une merveilleuse façon d'entrer dans son univers.
Tout d'abord publiées séparément, elles ont été rassemblées en un seul ouvrage, construisant alors un édifice précieux et cohérent, riche d'un sens global nouveau.
Fables ou apologues, elles sont brèves et profondes, écrites avec une remarquable économie de mots et la splendide simplicité qu'on connaît à cette romancière.
Les mêmes thèmes reviennent, tissant la cohérence évoquée plus haut : la force de l'amitié, la trahison, la liberté, l'héroïsme, le temps qui passe et la vieillesse, le pouvoir de l'amour, la violence du souvenir, la fragilité du bonheur, le long cheminement pour se trouver ... Et enfin, surtout ? l'extraordinaire puissance de la mort, qui nous met face à notre vérité d'être humain, alchimiste ultime de nos destinées.
Au bout du compte, que restera-t-il quand les vaines apparences seront dissipées, quand le processus d'épuration aura fini son ouvrage ? Avant de l'affronter, voire de l'accepter stoïquement, que faut-il avoir accompli ?
L'errance en quête d'authenticité, les contradictions humaines, l'idée que l'art peut nous sauver, nous "ressusciter", et ainsi nous conférer l'immortalité, la sincérité comme vertu, la bravoure comme ressource, l'amour - et aussi maternel - comme valeur suprême, qui peut, justement, défier notre retour au néant, il y a tout cela dans ces superbes nouvelles intemporelles.
Bien qu'inspirées de traditions dites "orientales", elles accèdent à l'universalité et peuvent toucher chacun d'entre nous avec une acuité et une pertinence toujours d'actualité.
Au cours d'une vie, une nourriture à découvrir, redécouvrir, lire et relire, sans se lasser.