19 février 2022

Chronique littéraire : Première personne du singulier, Nouvelles de Haruki Murakami (Belfond).

Résumé

Après le succès de Des hommes sans femmes, Murakami renoue avec la forme courte. Composé de huit nouvelles inédites, écrites, comme son titre l’indique, à la première personne du singulier, un recueil troublant, empreint d’une profonde nostalgie, une sorte d’autobiographie déguisée dont nous ferait cadeau le maître des lettres japonaises.

Un homme se souvient

De la femme qui criait le nom d’un autre pendant l’amour

Du vieil homme qui lui avait révélé le secret de l’existence, la « crème de la crème de la vie »

De Charlie Parker qui aurait fait un merveilleux disque de bossa-nova s’il en avait eu le temps

De sa première petite amie qui serrait contre son cœur le vinyle With the Beatles

Des matchs de base-ball si souvent perdus par son équipe préférée

De cette femme si laide et si séduisante qui écoutait le Carnaval de Schumann

Du singe qui lui avait confessé voler le nom des femmes qu’il ne pouvait séduire

De ces costumes qu’on endosse pour être un autre ou être davantage nous-même.

Un homme, Murakami peut-être, se souvient que tous ces instants, toutes ces rencontres, anodines ou essentielles, décevantes ou exaltantes, honteuses ou heureuses, font de lui qui il est.

L'auteur

Né à Kyoto en 1949 et élevé à Kobe, Haruki Murakami a étudié le théâtre et le cinéma, puis a dirigé un club de jazz, avant d’enseigner dans diverses universités aux États-Unis. En 1995, à la suite du tremblement de terre de Kobe et de l’attentat du métro de Tokyo, il décide de rentrer au Japon.

Plusieurs fois pressenti pour le prix Nobel de littérature, Haruki Murakami a reçu le Yomiuri Literary Prize, le prix Kafka, le prix de Jérusalem pour la liberté de l’individu dans la société en 2009 et le prix Hans Christian Andersen en 2016.

Tous ses romans sont disponibles chez Belfond et repris en poche par 10/18.


Notre chronique

Des nouvelles singulières et, semble-t-il, à base d’anecdotes personnelles qui nous rappellent les autres écrits de Murakami. En effet, nous retrouvons, avec délice, ces thématiques que nous apprécions tant, tel l’extraordinaire s’invitant dans un quotidien banal, Éros et Thanatos, le hasard, les questions existentielles (Rêvons-nous, imaginons-nous des histoires ou sommes-nous bien vivants ?)...

Huit nouvelles touchantes, nostalgiques, qui traitent également des souvenirs, du passé, du passage, du sens de l’existence et de sa fugacité

« À chaque instant, nos corps, sans espoir de retour, s’en vont vers l’anéantissement. 

À peine a-t-on fermé les yeux, puis les a-t-on rouverts, que bien des choses ont disparu (certaines avaient un nom, d’autres pas). Soufflées par les vents violents de la pleine nuit, elles ont été emportées quelque part sans laisser de trace. Il n’en subsiste qu’un frêle souvenir. Mais non, on ne peut pas compter sur les souvenirs non plus. »

Des textes qui nous enchantent par leur simplicité, humilité, mais aussi par leur puissance évocatrice et par les émotions qu’elles font naître.

« Ce qui me rend mélancolique, je crois, à propos des jeunes filles de mon entourage, des vieilles dames maintenant, c’est d’être obligé de reconnaître que mes rêves de jeunesse ont disparu à tout jamais. La mort d’un rêve est peut-être plus triste, en un sens, que celle d’un être vivant. »

Des sujets variés, mais qui tous nous ramènent à la vie et l’amour, à l’écriture et la création. Et, comme chaque fois qu’il s’agit d’une œuvre majeure, toutes ces histoires, si propres à un seul, ont une portée et une résonance universelles.

Un texte sobre, puissant, qu’on ne repose pas avant de l’avoir terminé.

#HarukiMurakami #NetGalleyFrance


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