23 juillet 2021

Chronique littéraire : L'incolore, Tsukuru Tazaki et ses années de pèlerinage de Murakami (Belfond).

                            Description de l'éditeur

« Depuis le mois de juillet de sa deuxième année d'université jusqu'au mois de janvier de l'année suivante, Tsukuru Tazaki vécut en pensant presque exclusivement à la mort. »   À Nagoya, ils étaient cinq amis, inséparables. Puis Tsukuru a gagné Tokyo. Un jour, ils lui ont signifié qu'ils ne voulaient plus jamais le voir. Sans raison. Pendant seize ans, celui qui est devenu architecte a vécu séparé du monde. Avant de rencontrer Sara. Pour vivre cet amour, Tsukuru va entamer son pèlerinage, et confronter le passé pour comprendre ce qui a brisé le cercle. 

Renouant avec le réalisme onirique de ses débuts, le maître conteur de la trilogie 1Q84 tisse une fable initiatique d'une envoûtante étrangeté, à la mélancolie apaisée. 

« Entrer dans ce livre, c'est comme faire un rêve dont on sait d'avance qu'on se réveillera plus heureux. » Elle.    

Traduit du japonais par Hélène Morita. 

Notre chronique

"On ne peut pas effacer l'histoire ni la réécrire. Ce serait comme vouloir effacer sa propre existence."

Il est difficile de décrire ce que l'on ressent pendant la lecture d'un roman de Murakami. Beaucoup de douceur, de profondeur et de réflexions sur le monde et sur ce qui fait de nous des êtres particulièrement complexes en filigrane. Un texte réaliste et onirique à la fois qui nous emmène sur les traces du pèlerinage de Tsukuru. Un personnage qui se croit incolore mais qui, au contraire, est haut en couleurs et prêt à tout par amour, même à affronter un passé qui le traumatise encore seize ans plus tard. Une quête de soi, une quête de l'autre, un voyage autant spirituel que physique qui nous encourage à toujours aller de l'avant.

"Quand, l'été précédent, il avait été brutalement rejeté par ses amis, le jeune homme appelé Tsukuru Tazaki avait rendu son dernier soupir. Seule son apparence extérieure s'était difficilement maintenue, et, depuis presque six mois, elle s'était en grande partie transformée, renouvelée. son corps, son visage avaient changé ; sa manière de voir le monde avait changé. La sensation du vent qui souffle, le bruit de l'eau qui coule, la lumière s'insinuant entre des nuages, et même les teintes des fleurs se modifiant selon les saisons -- toutes ses perceptions, il les interprétait maintenant différemment. Ou bien il les éprouvait comme si tout chose venait tout juste d'apparaître. À première vue, l'image dans le miroir avait l'air de refléter Tsukuru Tazaki, mais, en réalité, ce n'était pas lui. Ce n'était rien d'autre qu'une enveloppe, dont le contenu avait été remplacé, et que, par commodité, on continuait d'appeler Tsukuru Tazaki."

L'histoire d'un être tué de l'intérieur, effacé, invisibilisé, qui n'est plus que survie solitaire. Et qui devient architecte pour, on peut le penser, tenter inlassablement de rééchafauder ce qui a été détruit, réédifier sa propre existence, reconstruire son estime de soi.

De nombreuses pistes, chères à l'auteur, sont explorées : la différence entre réalité et rêve, entre le corps et l'esprit, la solitude, le néant et la substance, sa place dans l'univers...

"Se séparer de soi. Contempler sa propre souffrance comme s'il s'agissait de celle de quelqu'un d'autre."

En conclusion, un Murakami magique, à déguster, chérir et partager en musique (omniprésente dans son oeuvre) !

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