05 mai 2025

Chronique littéraire : Tout le bruit du Guéliz de Ruben Barrouk (Albin Michel).


Présentation de l'éditeur

Sélection Prix Stanislas du premier roman
« Le bruit condamne l’Homme à l’oubli. Mais parfois il arrive qu’il le sauve de l’oubli. Il ne tient qu’à nous de l’entendre. »
Dans le quartier du Guéliz à Marrakech, un mystérieux bruit hante et tourmente, nuit et jour, une vieille dame. Inquiets, sa fille et son petit-fils quittent Paris pour mener l’enquête. Sur place, ils guettent, épient, espèrent, mais aucun bruit ne se fait entendre...
Tout le bruit du Guéliz ne nous livre pas une mais mille histoires : celles des exodes, des traditions, des liens qui se font et se défont, des origines perdues.
À la violence et au vacarme assourdissant de notre époque, ce premier roman aux allures de conte, à la fois tendre, drôle et bouleversant, oppose un bruit. Le bruit du Guéliz. Celui d’un temps révolu, où l’on vivait ensemble.

Notre chronique

Tout le bruit du Guéliz nous plonge dès les premières lignes dans un univers où le temps semble suspendu. L’auteur nous enveloppe dans une atmosphère empreinte de mystère. Le récit s’ouvre sur un bruit qui hante les jours et les nuits de la grand-mère du narrateur. Ce bruit, énigmatique et insaisissable, rapproche nos protagonistes, le narrateur et sa mère, venus soutenir leur grand-mère/mère.
« Parfois, attendant qu’il surgisse du grand silence, elle préférait parler et faire passer le temps plutôt que porter ses pas au sommeil et à la nuit tranquille. » (Page 61) 
Mais au fil des pages, ce bruit devient le symbole de toute une mémoire collective, celle des juifs marocains, que l’exode et l’oubli menacent d’effacer. 
Ruben Barrouk, à la plume délicate et poétique, partage avec nous cette quête de sens et de racines. Chaque chapitre, court et incisif, nous fait basculer entre les époques et les souvenirs. 
« Ma mère était née là. Elle avait grandi là. Elle y revenait aujourd’hui, et ce n’était plus là. » (Page 17)
C’est tout un pan de l’histoire du Maroc, de ses communautés et de ses traditions qui se dévoile. On se perd et on se retrouve dans les ruelles du Guéliz et du Mellah, dans les méandres de la mémoire familiale, où chaque bruit, chaque silence, porte en lui un morceau d’histoire.
« Nous ne sommes pas au Mellah. Pas dans le vieux quartier juif. Car il n’y a pas de juifs. Il n’y en a aucun. » (Pp. 76-77)
Ce roman est un hommage à une époque où vivre ensemble avait un sens profond, où les liens sociaux se tissaient au quotidien, dans ces bruits familiers qui rythmaient la vie du quartier. C’est un pèlerinage que nous faisons par procuration. 
« Portée par l’indicible bonté, la gardienne de Moul Asguine veillait sur l’histoire juive du Maroc, sur ce grand feu où s’abattait la pluie de notre oubli. » (Page 202)
Tout le bruit du Guéliz est aussi un constat douloureux sur ce qui se perd, sur ce qui ne revient pas. Le bruit dont se plaint la protagoniste n’est-il pas, en fin de compte, le dernier souffle d’une mémoire qui lutte pour ne pas sombrer dans l’oubli ?
Ce roman, à la fois tendre, bouleversant et profondément humain, est une véritable invitation à écouter, à ressentir, à se souvenir et à voyager à Marrakech, dans le Haut Atlas… Un premier roman à découvrir.


Pour aller plus loin


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Gabriel et Marie-Hélène.