08 août 2018

Chronique : Les déracinés de Catherine Bardon (Les Escales)

Description de l'éditeur
Autriche, 1931. Lors d'une soirée où se réunissent artistes et intellectuels viennois, Wilhelm, jeune journaliste de 25 ans, a le coup de foudre pour Almah. Mais très vite la montée de l'antisémitisme vient assombrir leur histoire d'amour. Malgré un quotidien de plus en plus menaçant, le jeune couple attend 1939 pour se résoudre à l'exil. Un nouvel espoir avant la désillusion : ils seront arrêtés en Suisse. Consignés dans un camp de réfugiés, ils n'ont qu'un seul choix : faire partie des 100 000 Juifs attendus en République dominicaine après l'accord passé par le dictateur local Trujillo avec les autorités américaines. Loin des richesses de l'Autriche, la jungle sauvage et brûlante devient le décor de leur nouvelle vie. L'opportunité de se réinventer ?
L'auteure Catherine Bardon est une amoureuse de la République dominicaine. Elle a écrit des guides de voyage et un livre de photographies sur ce pays, où elle a passé de nombreuses années. Elle vit à Paris et signe avec Les Déracinés son premier roman.




Notre chronique 




Catherine Bardon nous offre avec ce roman foisonnant un texte dense, intense, à l’écriture maîtrisée, dont il est difficile de s’extraire. La première partie de ce récit singulier se déroule dans la Vienne pré-nazie, et doit beaucoup nous semble-t-il, pour son réalisme, pour la richesse de ses détails, à Stefan Zweig, en particulier à sa chronique autobiographique : Le Monde d’hier. C’est donc la deuxième partie qui, par son originalité, a le plus retenu notre attention, puisqu’elle se déroule en République dominicaine et qu’elle narre l’exil d’une communauté de juifs expatriés.
 Qui aurait pu imaginer que dans les multiples rebondissements de cette guerre (la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité) de véritables kibboutz avaient été établis en pleine jungle sud-américaine ? Et pourtant, comme nous l’apprend l’auteure qui connaît bien la République dominicaine puisqu’elle y a vécu, ce fut bel et bien le cas.
On suit donc avec stupéfaction l’aventure de ces jeunes immigrants issus de toutes les classes sociales de la société, d’autant plus que les circonstances les poussent à se convertir à la vie agricole, eux qui furent ingénieurs ou enseignants, une véritable gageure dans cette contrée isolée où tout, du climat à la géographie, est aberration pour des Européens.
Toutefois, il s’avère rapidement que les juifs américains, puissante communauté humaine et financière, veillent au grain, car en dehors de la rude réalité quotidienne, décrite sans concession par notre auteure, apparaît au fil du récit que des intérêts supérieurs chaperonnent ce projet, sorte de préfiguration de la création d’un état juif en Palestine. L’idée d’installer des hommes et des femmes issus de tous les pays en plein désert est-elle réalisable ? Et nos héros ne sont-ils pas des cobayes envoyés au bout du monde pour tester la viabilité d’un état juif ?
Beaucoup laisseront leur vie dans cette république bananière dirigée par un dictateur impitoyable. Mais ce roman n’est pas qu’un témoignage historique, c’est aussi une histoire d’amour. Un amour puissant. Et l’amour, comme dans toutes les histoires romantiques, n’est-il pas capable de survivre aux conditions les plus extrêmes ?



Pour aller plus loin BabelioLisez !
Un grand merci aux Éditions Les Escales.


Retrouvez la chronique de Bye Bye Vitamines également publié aux Escales.

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