15 mai 2020

Chronique littéraire : Le consentement de Vanessa Springora (Editions Grasset).

Présentation de l'éditeur
Au milieu des années 80, élevée par une mère divorcée, V. comble par la lecture le vide laissé par un père aux abonnés absents. A treize ans, dans un dîner, elle rencontre G., un écrivain dont elle ignore la réputation sulfureuse. Dès le premier regard, elle est happée par le charisme de cet homme de cinquante ans aux faux airs de bonze, par ses œillades énamourées et l'attention qu'il lui porte.
Plus tard, elle reçoit une lettre où il lui déclare son besoin " impérieux " de la revoir. Omniprésent, passionné, G. parvient à la rassurer : il l'aime et ne lui fera aucun mal. Alors qu'elle vient d'avoir quatorze ans, V. s'offre à lui corps et âme. Les menaces de la brigade des mineurs renforcent cette idylle dangereusement romanesque. Mais la désillusion est terrible quand V. comprend que G. collectionne depuis toujours les amours avec des adolescentes, et pratique le tourisme sexuel dans des pays où les mineurs sont vulnérables.
Derrière les apparences flatteuses de l'homme de lettres, se cache un prédateur, couvert par une partie du milieu littéraire.
V. tente de s'arracher à l'emprise qu'il exerce sur elle, tandis qu'il s'apprête à raconter leur histoire dans un roman. Après leur rupture, le calvaire continue, car l'écrivain ne cesse de réactiver la souffrance de V. à coup de publications et de harcèlement.
" Depuis tant d'années, mes rêves sont peuplés de meurtres et de vengeance. Jusqu'au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence : prendre le chasseur à son propre piège, l'enfermer dans un livre ", écrit-elle en préambule de ce récit libérateur.

Plus de trente ans après les faits, Vanessa Springora livre ce texte fulgurant, d'une sidérante lucidité, écrit dans une langue remarquable. Elle y dépeint un processus de manipulation psychique implacable et l'ambiguïté effrayante dans laquelle est placée la victime consentante, amoureuse.

Mais au-delà de son histoire individuelle, elle questionne aussi les dérives d'une époque, et la complaisance d'un milieu aveuglé par le talent et la célébrité.

L'auteure
Vanessa Springora est une auteure, éditrice et réalisatrice française.
Diplômée d'un DEA de lettres modernes à l'université de Paris-Sorbonne, elle est directrice des Editions Julliard depuis le 1er décembre 2019.
Vanessa  a débuté sa carrière en 2003 en tant que réalisatrice-auteure pour l’Institut national de l’audiovisuel, avant de rejoindre les éditions Julliard comme assistante d’édition en 2006. Editrice au sein de cette prestigieuse maison depuis 2010, elle accompagne l’ensemble des auteurs Julliard dans le suivi éditorial de leurs textes et est en charge de découvrir de nouveaux auteurs.
En parallèle, pour les éditions Robert Laffont, elle coordonne depuis 2010 la collection "Nouvelles Mythologies" dirigée par Mazarine Pingeot et Sophie Nordmann.
Elle est également l’auteure de "Le Consentement" (2020), où elle raconte comment elle a été, à 14 ans, sous l'emprise du célèbre écrivain Gabriel Matzneff.

Notre chronique
Un ouvrage fort, écrit avec simplicité, dans une langue riche et belle, qui, sous forme d’autobiographie, analyse les faits vécus par V. adolescente, une fois que l’auteure est capable de le faire, adulte qui n’est plus sous l’emprise de l’homme qui sous couvert de grands sentiments l’a utilisée sexuellement.
Un livre qui touche, forcément, qui analyse la situation de part et d’autre : ce que l’adolescente ressentait, qui elle était (une jeune déboussolée par la perte de repères puisque son père était aux abonnés absents, à la recherche d’une figure paternelle, d’un adulte qui s’intéresse à elle.)
Un retour en arrière salutaire mais qui blesse : comment sa mère, son père, ont-ils pu ne pas la protéger ? Comment une telle histoire a pu être possible au vu et su de tous, alors qu’elle était dans l’illégalité totale ?
Un ouvrage qui a dû être très difficile à écrire, qui a pu l’être avec le soutien de sa famille, et qui est, on l’espère comme l’auteure, apaisé.
Nous avons ici le point de vue de l'adulte qui livre le ressenti de la jeune fille d'alors, sans embellissements.
Il faudrait bien sûr revenir sur la notion de consentement, car ce titre n'a pas été choisi au hasard. 

Ce livre qui est un cri brut, magnifiquement traduit en mots, à lire absolument.

Pour aller plus loin




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Gabriel et Marie-Hélène.